On les appelle les raisins de la mer. De jolies grappes noires, que l’on retrouve parfois sur la plage. Les œufs de seiche, en mer, se fixent autour de supports fixes naturels (comme les herbiers de zostère) ou d’origine humaine (tables ostréicoles, casiers de pêche, mouillages).

Afin d’éviter une grande déperdition de ces œufs lorsque les engins de pêche sont ramenés à terre et nettoyés, le Parc naturel marin du Bassin d’Arcachon, le CAPENA* et le CDPMEM* ont décidé en 2021 d’expérimenter la mise en place d’un incubateur immergé dans le Bassin. Son objectif ? « Éviter la mortalité des œufs pondus sur les engins de pêche. Ils peuvent et ils doivent être sauvegardés », indique Guillaume Ortega, chargé de mission au CAPENA. « Ce type d’action vise à contribuer au succès de la reproduction de la seiche dans l’intra-Bassin », souligne Kévin Leleu, chef de l’unité Usages maritimes au Parc naturel marin.

Un outil qui répond également aux attentes de pêcheurs professionnels, qui souhaitent eux aussi contribuer à la sauvegarde de l’espèce. Pour Nicolas Bonnat, l’un des pêcheurs participant au projet, c’est une manière « d’apporter (sa) pierre à l’édifice. Auparavant, déjà, je récupérais les œufs non éclos sur mes engins de pêche pour les mettre dans mes bassins. Je relâchais ensuite les juvéniles dans la mer. Aujourd’hui, c’est à plus grande échelle ! »

L’incubateur se présente sous la forme d’une grande structure en aluminium comprenant plusieurs compartiments. Il est placé dans le secteur de Graouères d’avril à juillet, et fait l’objet d’un balisage spécifique. Conçu sur mesure par un soudeur du Bassin d’Arcachon, il dispose d’une ouverture par le dessus pour que les pêcheurs professionnels puissent y déposer les œufs de seiche récupérés sur leur matériel. Une fois mis à incuber, les œufs donnent naissance aux juvéniles 35 à 45 jours plus tard. Ils peuvent alors rejoindre le milieu naturel en passant entre les mailles de l’incubateur.

Chaque semaine, des suivis sont réalisés par le CAPENA. L’incubateur est remonté à l’aide d’une grue et posé à bord du bateau d’un pêcheur participant à l’opération. Les œufs sont minutieusement comptés afin de mesurer le taux d’éclosion. Les résultats sont très encourageants : le taux de survie de ces œufs est en moyenne de 50 %. De nombreux paramètres sont mesurés afin de mieux connaître et comprendre ce phénomène. La densité des œufs placée dans l’incubateur joue un rôle essentiel pour leur survie. En 2022, on estime qu’environ 20 000 juvéniles sont nés dans l’incubateur.

En 2021, ce projet a bénéficié d’un financement de la Région Nouvelle-Aquitaine et du Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP).

*CAPENA : Centre pour l’aquaculture, la pêche et l’environnement de Nouvelle-Aquitaine
CDPMEM : Comité départemental des pêches maritimes et des élevages marins.